Il était une fois, dans une ville pas plus grande qu’une noix, un horloger nommé Éloi. Éloi était un artiste, mais il était malheureux. Pourquoi ? Parce qu’il rêvait d’une grande aventure.

Il passait ses journées à réparer des engrenages rouillés et à polir des aiguilles de montres. C’était un travail précis, mais tellement, tellement ordinaire.
« Ah, si seulement j’étais explorateur ! » soupirait-il en regardant par sa petite fenêtre poussiéreuse. « Si seulement je trouvais un trésor ou si j’étais appelé à sauver le monde ! »
Un jour, un mystérieux voyageur entra dans sa boutique. Il avait l’air épuisé et portait une petite boîte en bois.
« Horloger, j’ai voyagé jusqu’au bout du monde, » dit le voyageur d’une voix faible. « J’ai trouvé ce trésor. C’est de la poussière d’or d’événements rares. Un seul grain suffit à créer un souvenir spectaculaire. Mais ma boîte est cassée, l’or se perd ! »
Éloi était stupéfait. Enfin ! L’extraordinaire frappait à sa porte ! Il prit la boîte et passa la nuit entière à la réparer.
Le lendemain, le voyageur revint. « Merci, Éloi. En récompense, je te donne un petit sachet de cet or. Utilise-le pour créer ta Grande Aventure ! »
Éloi était fou de joie ! Il garda précieusement le sachet.
Il décida d’attendre le moment parfait. Il se dit : « Je ne vais pas gaspiller cet or sur une journée banale ! »
Les semaines passèrent.
- Il ne jeta pas une pincée d’or quand son voisin, M. Henri, lui apporta des beignets. « C’est juste un beignet, » pensa Éloi.
- Il ne l’utilisa pas quand un orage violent s’abattit, et qu’il passa une soirée cosy avec son chat au coin du feu. « C’est juste la pluie, » pensa Éloi.
- Il n’en mit pas quand une petite fille vint le voir, émerveillée par le tic-tac des montres, et qu’il lui expliqua, patient, comment le temps fonctionnait. « C’est juste mon travail, » pensa Éloi.
Les mois devinrent des années. Éloi vieillissait. Le sachet était toujours intact, caché sous son établi.
Un soir, vieux et fatigué, Éloi regarda le sachet d’or. Il ne l’avait jamais utilisé.
Il réalisa alors quelque chose de stupéfiant.
Il n’avait pas eu besoin de la poussière d’or.
Il se souvenait parfaitement du goût des beignets de M. Henri. Il se souvenait de la chaleur du feu pendant l’orage. Et il se souvenait surtout des yeux brillants de la petite fille quand elle avait compris le secret des engrenages.
Il réalisa que toutes ces choses qu’il avait jugées ordinaires étaient en fait la véritable aventure de sa vie. Elles étaient les seuls moments qui lui laissaient un goût de douceur et de chaleur dans le cœur.
Éloi sourit, prit le sachet, et jeta la Poussière d’Or par la fenêtre. Le vent emporta les grains, qui brillèrent une seconde avant de disparaître.
À partir de ce jour, Éloi continua son travail d’horloger. Mais désormais, quand il entendait le tic-tac d’une montre, il n’entendait plus le temps qui passe. Il entendait le rythme de la vie, et il souriait, car il savait que le plus grand trésor n’était pas à chercher, mais juste à vivre.

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