L’affrontement entre Becket et Henri II portait sur la liberté de l’Église et son droit à une sphère d’autonomie face au pouvoir du Roi. Aujourd’hui, même si les rois absolus ont disparu et que nous vivons en démocraties sécularisées (laïques), la lutte entre ces deux sphères continue.

Voici comment on peut transposer le conflit de Becket à notre époque :

L’enjeu n’est plus la juridiction sur les clercs, mais l’application des lois civiles aux institutions religieuses et la liberté d’expression des croyants.

  • Le Droit à l’Objection de Conscience : Des professionnels (médecins, pharmaciens, enseignants) peuvent se trouver en contradiction avec certaines lois ou pratiques étatiques (euthanasie, avortement, etc.). Le dilemme est similaire à celui de Becket : jusqu’où l’individu est-il obligé de se plier à une loi civile s’il juge qu’elle contredit une loi morale supérieure ou sa foi ? La figure de Becket encourage à défendre la primauté de la conscience éclairée.
  • La Neutralité des Institutions : L’État exige la neutralité des institutions (écoles, hôpitaux, associations) qui reçoivent des fonds publics. Pour les institutions religieuses, cela crée une tension. Elles doivent-elles renoncer à une partie de leur identité et de leurs valeurs fondatrices pour se conformer aux exigences de l’État ? C’est le nouveau champ de bataille pour l’autonomie.

Aujourd’hui, le « Roi » n’est plus une personne, mais souvent l’ensemble des normes culturelles, médiatiques et sociales dominantes (le politiquement correct, les idéologies à la mode, la pression du consensus).

  • L’Exclusion du Débat Public : L’Église ou les croyants peuvent être tentés par le silence pour ne pas devenir un « signe de contradiction » (pour reprendre la première réflexion !). Le risque est de voir le message de l’Évangile être réduit à une affaire purement privée, sans influence sur les débats de société (bioéthique, justice sociale, écologie).
  • Le Courage de Témoigner : L’exemple de Becket est un appel à la parole prophétique. Comme l’archevêque s’est opposé à l’injustice d’Henri II au péril de sa vie, l’Église (et les chrétiens) est appelée à parler avec clarté et sans peur des conséquences quand la dignité humaine, la justice ou le bien commun sont menacés.

Finalement, Saint Thomas Becket nous rappelle la nécessité de l’intégrité. Il est passé de la servilité politique à la fidélité spirituelle.

Dans le contexte actuel, cela signifie pour les chrétiens :

  1. Être des citoyens engagés qui respectent les lois de la République, mais…
  2. …Ne jamais laisser l’État ou la pression sociale dicter leur conscience en matière de morale, d’éthique ou de foi.

Becket incarne le refus du compromis facile entre le confort personnel et la vérité. C’est un martyr pour la liberté de conscience, une valeur que nos démocraties tiennent pour fondamentale, mais qui est sans cesse à défendre.

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