Il était une fois, loin derrière les montagnes où les sapins sentaient la cannelle et la neige ne fondait jamais, un village nommé Éclat-doux. Ce village avait une réputation : c’était le lieu où Noël était le plus brillant. Chaque année, les habitants rivalisaient pour installer des décorations plus grandes, des lumières plus puissantes, des feux d’artifice plus bruyants.

À Éclat-doux, la tradition n’était plus de partager, mais de comparer. Les enfants ne demandaient plus des histoires, mais des jouets avec des batteries. La magie de Noël était devenue un spectacle coûteux.

Au cœur de ce tourbillon de lumière artificielle vivait un petit hérisson nommé Picou. Picou n’avait pas de guirlandes, juste des aiguilles. Il vivait sous un vieux chêne, à l’écart de la place principale. Chaque soir de décembre, il observait le village s’allumer : c’était beau, certes, mais l’air était rempli d’une étrange tension. Les gens couraient, s’énervaient quand une ampoule grillait, et oubliaient même de se dire bonjour.

Un soir, le jour de la Veille, une chose terrible arriva : l’Étoile-Mère, l’immense étoile dorée qui couronnait le sommet de la plus haute église et qui était censée éclairer la route des Fêtes, s’éteignit.

Ce fut le chaos. Les gens hurlèrent. — « On ne verra rien ! » — « La fête est gâchée ! » — « Nos décorations ne servent à rien si l’Étoile ne brille plus ! »

Ils essayèrent tout : des échelles immenses, des projecteurs puissants. Rien n’y fit. Le village, malgré ses millions de lumières clignotantes, se sentit complètement vide et sombre.

Alors que tout le monde était occupé à se plaindre de la panne, Picou, le petit hérisson, se sentit très triste. Non pas pour la lumière manquante, mais pour la tristesse des cœurs. Il se souvint d’une légende que sa grand-mère lui racontait : l’Étoile-Mère n’était pas alimentée par des fils, mais par la plus simple et la plus douce des lumières.

Picou se mit en route vers l’église. Il ne courait pas ; il marchait lentement, ramassant sur le chemin trois choses toutes simples :

  1. Une petite pomme de pin ramassée dans la forêt silencieuse.
  2. Un brin de mousse verte et douce trouvé au pied d’un mur.
  3. Une unique, minuscule larme de cire tombée d’une bougie que personne n’avait remarquée.

Arrivé au pied de l’église, sans faire de bruit, il grimpa de son mieux sur la première marche, puis la deuxième. Il atteignit la petite niche au pied du clocher, là où, selon la légende, il fallait déposer un vœu du cœur.

Picou ne fit pas de vœu pour lui. Il déposa ses trois trésors simples — la pomme de pin, la mousse, la larme de cire — et murmura, avec toute l’humilité de son petit cœur :

— « Que la fête puisse recommencer. Non pas pour briller, mais pour réchauffer ceux qui ont froid dans leur cœur. »

À peine eut-il fini de murmurer que la larme de cire se mit à luire. Une lumière chaude, dorée, mais incroyablement douce, s’en dégagea. Elle monta, monta, comme un fil d’or invisible, jusqu’au sommet du clocher.

L’Étoile-Mère ne s’est pas rallumée avec un grand flash. Elle a commencé à s’allumer doucement, doucement, avec une lueur dorée, réelle, qui n’éblouissait pas, mais qui invitait au calme.

Les villageois, qui s’étaient tus par surprise, regardèrent cette lumière si différente. C’était une lumière qui ne venait pas d’une prise, mais d’une sincérité.

Dès lors, à Éclat-doux, les traditions changèrent. On laissa les grandes illuminations pour de petites bougies. On ne chercha plus à avoir le sapin le plus haut, mais le foyer le plus chaleureux. Et chaque année, c’est le hérisson Picou qui avait l’honneur de monter la première petite bougie, pour rappeler à tous que la plus grande magie de Noël réside dans le plus simple et le plus humble des gestes partagés.

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