Il était une fois, dans une ville où tout se mesurait à l’aune de la richesse, un homme nommé Midas. Non pas le roi de l’ancienne légende, mais un homme moderne, pour qui chaque minute devait produire de l’or. Son compte en banque était un monument, son portefeuille une forteresse, et sa vie, un calcul constant. Midas était riche, mais son cœur était une chambre forte vide, sans écho.

Il vivait dans un quartier luxueux, loin des ruelles animées où les rires des enfants remplaçaient le son des billets. Il n’avait pas d’amis, car il ne voyait en eux qu’une dépense de temps sans retour sur investissement. Il n’aimait personne, car l’amour ne se monnaye pas. Il possédait tout, sauf ce qui avait de la valeur.

Un jour, une vieille femme vêtue de haillons s’approcha de lui dans un parc. Elle n’avait rien, si ce n’est un sourire usé par la vie. Elle ne lui demanda pas d’argent, mais le regarda avec une étrange douceur. « Votre cœur est lourd, monsieur », dit-elle d’une voix douce. « Je peux vous donner quelque chose qui le rendra léger. »

Midas, habitué aux mendiants, s’impatienta. « Je n’ai pas de temps pour vos sornettes », rétorqua-t-il. « Je ne donne rien pour rien. »

La vieille femme ne se découragea pas. « Je ne vous demande rien. Je veux juste échanger un peu de votre tristesse contre un peu de ma joie. »

Midas ne comprit pas. Il haussa les épaules et continua son chemin. Mais la phrase de la vieille femme s’était glissée dans sa tête comme un virus. Échanger la tristesse contre la joie ? C’était un concept étranger.

Les jours suivants, Midas ne put oublier cette rencontre. Il s’assit sur un banc, observant les gens. Il vit une mère rire aux éclats avec son enfant et il sentit un pincement au cœur. Il vit un jeune homme aider une personne âgée à porter ses courses et il sentit une chaleur qu’il n’avait jamais connue. Il vit des amis se saluer avec une étreinte sincère et il sentit une douleur, la douleur de la solitude.

Il comprit alors ce que la vieille femme voulait dire. La vraie richesse ne s’accumule pas, elle se partage.

Le lendemain, il se rendit au même parc. La vieille femme était là, assise sur le même banc. Cette fois, Midas s’approcha d’elle. « Madame », dit-il, sa voix moins assurée qu’à l’habitude, « votre proposition tient-elle toujours ? »

La femme sourit. « Toujours. »

Midas s’assit à côté d’elle. Il ne lui donna pas d’argent, mais il fit la seule chose qu’il n’avait jamais faite : il lui raconta sa vie. Sa solitude, son vide intérieur, son obsession de l’argent. Et la vieille femme l’écouta, sans jugement, avec une infinie patience. Elle ne dit rien, mais elle lui tendit la main, et Midas la serra.

Ce jour-là, Midas ne s’est pas enrichi, il s’est transformé. Il a échangé un peu de sa solitude contre un peu de la joie de l’autre. Il a découvert que le plus grand des trésors n’est pas ce que l’on garde, mais ce que l’on donne. Son cœur n’était plus une chambre forte, mais un jardin où l’amour pouvait enfin pousser.

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